Le 17 septembre 2024, s'est tenu un groupe de travail ministériel sur la restauration collective. Solidaires Finances a siégé.
Déclaration liminaire
La rentrée 2024 est inédite. La crise démocratique et institutionnelle a franchi un nouveau cap avec la nomination de Michel Barnier, issu des rangs du cinquième groupe parlementaire représenté à l’Assemblée Nationale, comme premier ministre, piétinant ainsi les résultats des élections législatives. Sans surprise, cette nomination poursuivra la politique ultra-libérale menée depuis des décennies. Celle qui a été rejetée à la fois par le mouvement social de grande ampleur de 2023 contre la réforme des retraites et plus récemment dans les urnes.
Sous prétexte d’un déficit public sans précédent qui, pour le Gouvernement démissionnaire, serait dû à trop de dépenses publiques, le projet de loi de finances 2025 sera de manière certaine celui de l’austérité.
A cette date, le 17 septembre, l’Action sociale ministérielle voit son budget maintenu, sur les montants 2024. Mais sans tenir compte de l’inflation. Est-ce réellement un maintien, ou plus certainement une baisse au final ? C’est sans tenir compte également des discussions budgétaires qui doivent se tenir.
Pour Solidaires Finances, le budget de l’Action sociale ministérielle ne paraît pas si sanctuarisé que cela.
Ce groupe de travail Restauration, maintes fois réclamé, et tant attendu depuis le précédent tenu en septembre 2023, ne peut être décorrélé du budget de l’Action sociale ministérielle. Pour Solidaires Finances, le sujet de la restauration collective embrasse tous les sites de toutes les directions qui composent notre ministère. Il ne saurait se réduire à AGRAF ou à Bercy.
De même, la DGFiP n’est pas la seule direction à réseau. Elle seule a eu droit à une fiche dédiée. Quid des autres ?
Le futur de la restauration au sein de notre ministère est incertain. Solidaires Finances exige une restauration collective de proximité, à tarif social, équilibrée et de qualité pour l’ensemble des personnels, actifs et retraités. C’est une question de santé publique !
C’est aussi, pour bon nombre d’agents et d’agentes, le seul repas complet de la journée, faute d’une rémunération suffisante, particulièrement dans un contexte inflationniste.
Malheureusement, ce n’est pas ce futur qui semble se dessiner...
Solidaires Finances a de nombreuses interrogations et interviendra sur les différents documents de travail fournis.
Solidaires Finances pleure la perte récente de Marc Veyrat, camarade très investi dans l’Action sociale, qui siégeait à l’Assemblée Générale d’EPAF mais également à celle d’AGRAF pendant de nombreuses années. Nous avons une pensée émue pour lui.
Compte-rendu
Rationaliser ! Optimiser !
Le groupe de travail du 17 septembre 2024, maintes fois réclamé, se tient quasi une année après le précédent sans annonce fracassante, sans aucun gouvernement ni aucun ministre, bref sans aucun pilote !
Le budget de l’Action sociale ministérielle est certes maintenu mais sans tenir compte de l’inflation…
Sans ordre du jour défini, la lecture des nombreux documents permet l’émergence d’une idée principale : l’optimisation de la ressource.
Solidaires Finances a rappelé la définition même de la restauration collective : une restauration de proximité, à tarif social, équilibrée et de qualité pour l’ensemble des personnels, actifs et retraités.
Une question de santé publique sur tous les sites, de toutes les directions qui composent notre ministère : il a fallu rappeler qu’elle ne se réduit pas à AGRAF ou à Bercy !!!
Situation des restaurants financiers
Le Secrétariat général fait l’état des lieux d’une grande diversité de situations en lien avec les solutions qu’il propose en alternative.
Les documents fournis attestent d’un manque de volonté sur le maintien de la restauration collective. Tous les arguments sont prétextes à la fermeture : la baisse de fréquentation dans les petites structures de restauration, le départ d’agent·es Berkani, les déménagements de services, des difficultés financières ou au niveau de la gouvernance des associations de gestion des restaurants.
Entre 2021 et 2023, le nombre de REFI (Restaurants Financiers) est passé de 214 à 186, laissant ainsi plusieurs départements sans solution de restauration collective ! C’est d’autant plus dommageable que le restaurant collectif coûte moins cher que les titres-restaurant (coût de revient par agent·e).
Pour rappel, le conventionnement n’est qu’une alternative et Solidaires Finances revendique toujours la restauration collective comme seule proposition pour toutes et tous.
Après 6 fermetures au 1er semestre 2024, la DGFiP nous rassure, aucune autre fermeture de restaurants financiers n’est prévue d’ici la fin de l’année… à surveiller …
Méthodologie du diagnostic des restaurants financiers avant fermeture
Le Secrétariat général propose une « belle fiche » de méthodologie en insistant sur plusieurs facteurs ou circonstances pour justifier une fermeture.
« Ce diagnostic doit s’appuyer sur une analyse approfondie du fonctionnement et de l’environnement du restaurant ainsi que des indicateurs financiers. »
Officiellement, « l’engagement de cette démarche doit faire l’objet le plus en amont possible d’une information dans le cadre du dialogue social. La décision prise à l’issue de ce diagnostic doit également s’inscrire dans un processus d’information des personnels et de discussion avec leurs représentants. »
Que de belles paroles quand, dans les instances, les fermetures ne sont jamais discutées !!
Au-delà du simple diagnostic, Solidaires Finances revendique un véritable soutien aux associations qui gèrent les REFI : formations, appui des référents restauration, temps de décharge…
Solidaires Finances réitère sa demande de mise en place d’un véritable soutien aux associations qui gèrent les REFI et qui sont bénévoles. Ce soutien pourrait ainsi permettre d’envisager l’amélioration de la restauration collective quand elle n’est pas satisfaisante au lieu de fermer directement les structures.
L’harmonisation tarifaire
Le Secrétariat général rappelle le dispositif de l’harmonisation tarifaire déployé de longue date, pour harmoniser le prix des repas payés par les agents du MEFSIN selon la nature de la solution de restauration dont ils relèvent.
Ce dispositif vise à proposer à chaque agent du MEFSIN un repas à un tarif ne devant pas excéder des montants désignés sous l’appellation de Plafond d’Harmonisation Tarifaire (PHT), historiquement différenciés entre l’Île-de-France et les autres régions, compte tenu du coût de la vie à Paris et en région parisienne. Le PHT est réévalué chaque année en CNAS (5,50 € en IDF et 6 € en province pour 2024).
De plus, les restaurants financiers sont gérés par des associations de gestion dont les membres sont pour une grande majorité d’entre eux, des agents et agentes des Finances publiques. Ces associations fixent le coût du repas au regard du contrat passé avec le prestataire. Les aides financières sont principalement apportées par la DGFiP avec la prise en charge du ou de la salarié·e de restauration (BERKANY ou salarié·e du prestataire), l’aide aux petites structures qui n’a pas augmenté depuis des années et qui est largement insuffisante. De ce fait, rares sont les agent·es bénéficiant du tarif plafond ministériel.
Pour rappel, Solidaires Finances s’oppose chaque année à la hausse du plafond qui augmente le reste à charge et exige un seul plafond d’harmonisation tarifaire valable partout, sans aucune distinction Paris/Province !
Bilan des expérimentations : frigos connectés et livraisons de repas
Les frigos connectés concentrent 2 types de restauration : celle issue des restaurateurs locaux (comme le restaurant « La Chartreuse » à Dijon) et une autre issue de l’agro-alimentaire (notamment les sociétés « Refectory » ou « Picard »).
* Pour appuyer sa solution alternative, et convaincre, le Secrétariat général a diligenté une expérimentation sur 2 sites ; la 1ère a débuté le 01/04/24 à Dijon pour 100 agent·es de l’INSEE et 26 des Douanes. Les repas (issus du restaurant « La Chartreuse ») sont mis à disposition des convives dans une vitrine connectée (3000 € pour l’installation et 1668 € de location mensuelle).
* Suite à la fermeture de plusieurs restaurants financiers et de RIE en Île-de-France, le Secrétariat général a expérimenté sur plusieurs sites, en liaison avec les directions, des solutions de livraison de repas avec notamment la start-up « Refectory ».
Le coût final par agent·e reste plus élevé qu’en restaurant administratif sans en avoir aucun des avantages : salle de restauration, services et personnel dédié.
D’ailleurs, la direction de l’INSEE souhaite abandonner cette trop coûteuse expérimentation.
Comment imaginer trouver des prestataires pour remplir des frigos alors qu’aucun ne répond aux appels d’offres ou aux simples conventions ?
Les seuls intéressés sont ceux de l’agro-alimentaire… Nous parlons toujours d’équilibre alimentaire et de santé publique ?
Bilan de la tarification au plat à AGRAF
Le bilan de l’expérimentation de la tarification au plat sur les restaurants de Bercy (Daumesnil, Diderot et Reuilly) nous a enfin été communiqué. Devant les résultats peu probants de cette expérimentation, Solidaires Finances a encore demandé la suppression de ce mode de tarification pour un retour à la tarification au plateau, présente sur l’ensemble des autres restaurants gérés par l’AGRAF.
Éléments financiers et EGALIM
La loi dite « EGAlim 1 » (loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous), a fixé à la restauration administrative publique un objectif ambitieux en termes d’approvisionnement : depuis le 1er janvier 2022, les restaurants doivent proposer 50 % de produits durables et de qualité, dont au moins 20 % de produits biologiques, dans la composition des repas servis.
Cette loi a été complétée par la loi « Climat et résilience » : loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Si AGRAF se félicite d’un bon taux de respect de la loi Egalim, il faut rappeler que pour atteindre les objectifs, elle est subventionnée par le Secrétariat général à plus de 3 millions d’euros, pour une couverture de 25 % des rationnaires concentrés sur le seul territoire de Paris et IDF : la vitrine pour rendre des comptes au Parlement.
A la sortie du Covid et dans un contexte inflationniste, la restauration en province a été mise en péril. Seule la DGFiP a décidé d’octroyer une prime exceptionnelle d’1,50 €/rationnaire pour aider les structures à répondre à Egalim et éviter les fermetures.
Bilan pour 2023 : 3 346 107 € pour AGRAF (seulement 25 % des rationnaires) et 1 557 737€ pour la DGFiP .
Rien pour les autres directions du ministère, le calcul est vite fait !
Encore une loi obligatoire sans moyen ni contrôle.
En conclusion et pour rappel, 71 % des rationnaires plébiscitent un repas dans un restaurant collectif et 28 % des bénéficiaires de titres-restaurant préféreraient également avoir accès à un restaurant collectif1. Dès lors pourquoi le Secrétariat général s’obstine à rechercher des solutions alternatives ?
Dans un contexte « de grande vigilance budgétaire » et sans information supplémentaire sur le financement 2025, le Secrétariat général n’a visiblement qu’un seul objectif, la rationalisation des circuits de financement et l’optimisation de la gestion !
1Enquête sur la restauration au sein des ministères économiques et financiers, menée du 12 octobre au 10 novembre 2023